Toute ma famille est réunie, tout le monde affiche un sourire radieux.
Pourquoi sont-ils aussi heureux ?
Il est là, lui aussi semble partager ce bonheur. Ils sont attablés, joyeux, ils prennent l'apéro. Le soleil brille, nous sommes au bord de la mer.
Magnifique paysage.
J'ai l'impression d'être face à une peinture hypocrite. Je n'ai jamais vu mes tantes aussi souriantes surtout quand elles sont à proximités les unes des autres. 

Les gué-guerres infantiles entre sœurs.
Maintenant tout est figé. Leurs rires, je n'en perçois même plus les sons.
Je n'en reviens pas, il est toujours là, le visage illuminé
par un sourie profond que je ne lui connaissais pas.


Il faut que je m'approche.

De toute mes forces, j'essaye en vain de bouger, de parler mais rien.
Je dois pourtant lui dire, il le faut ! Je peux encore le sauver.


Puis tout autour de moi se terni, s'efface, se noirci. Il ne reste que lui mais déjà il s'éloigne.
Figé.
Comme un fantôme, il disparaît.


Une douleur monte dans ma poitrine, de plus en plus forte. Elle serre mon cœur, mes poumons. J'ai mal, j'ai chaud. Je n'arrive plus à respirer, je suffoque, j’étouffe, je brûle.


Il fait parfaitement noir à présent. Je suis repliée sur moi même.
Il me semble que j'ai quelque chose dans les bras.
C'est doux. C'est mou.


Toujours aussi noir.


J'ai de nouvelles sensations dans le corps. Mes mains, mes bras, mes jambes, j'ai mal.
Mon corps entier souffre.

Sortant de ma torpeur, il fait si sombre...
Mais je n'ai plus peur.
Je suis dans mon lit. L'obscurité de ma chambre me rassure un peu.
Les odeurs, les textures.
Je serre mon ours en peluche très fort sur ma poitrine. Peut être est-ce cela qui me fait si mal ?
Je relâche légèrement mon étreinte
Non, je le resserre rapidement contre moi car au contraire, il semble apaiser mon mal être.

Puis soudain je prend conscience.

Grand père.


Je suis revenue à la réalité, cette réalité si cruelle.
Tu es parti, je ne te reverrai plus, et maintenant je dois admettre que jamais je ne pourrai te sauver.
C'est trop tard.


Mes yeux brûlent. Je n'étouffe plus, j’expire.
Je pleure.
Et mes larmes, tels des éclats de verre acérés, me creusent les yeux, me déchirent les joues avant de se briser sur mes draps.


Je me jette sur ma lampe de chevet.
Adieux obscurité.


Je vais lutter contre le sommeil qui me ronge. Depuis dès mois maintenant, dès que je m'endors, je revis les mêmes scènes. Je ne le supporte plus.


On dit que l'on pleure toutes les larmes de son corps. Mon corps doit être un puis sans fond car depuis cinq mois, depuis cet affreux 27 mai, mes larmes ne cessent de couler.